/Une réunion réservée aux «non-Blancs» au Luxembourg

Une réunion réservée aux «non-Blancs» au Luxembourg

L’association féministe et antiraciste luxembourgeoise Lëtz Rise Up organise un webinaire en «non-mixité racisée», ce samedi. Un concept relativement récent au Luxembourg*, qui a déjà suscité la polémique dans les pays voisins. Intitulée «Racisme structurel au Luxembourg: de quoi parle-t-on?», la conférence virtuelle n’est donc pas ouverte aux personnes blanches, mais «à toutes les personnes racisées (NDLR: assignées à une catégorie raciale) qui se sentent concernées par la lutte contre le racisme, sans limite de nombre, et sur inscription», explique à L’essentiel Sandrine Gashonga, présidente de Lëtz Rise Up et coanimatrice de l’événement.

Consciente du caractère sensible de ce type de réunion dans l’opinion publique, la présidente de Lëtz Rise Up anticipe les critiques: «Les détracteurs de ces réunions crient au “communautarisme” ou au “racisme anti-Blancs”, en oubliant que lorsque des syndicalistes se réunissent en non-mixité choisie, pour discuter des actions qui les concernent, ils n’invitent ni les cadres, ni les patrons et cela ne semble choquer personne», explique-t-elle, rappelant que ce type de rassemblements «a été formalisé dans les milieux activistes des droits civiques dans les années 60 aux États-Unis».

«Si cela est utile pour le vivre-ensemble, alors pourquoi pas»

L’intérêt pour les militants est de se retrouver entre personnes directement concernées, afin «de libérer la parole, sans risquer qu’elle ne soit délégitimée et d’avancer sur les thématiques et questions spécifiques liées à nos oppressions sans risquer de se faire “silencer”», explique Sandrine Gashonga. Une justification que comprend Corinne Cahen, qui évoque «les effets bénéfiques de la non-mixité, démontrés par la recherche en sciences sociales».

Interrogée par L’essentiel, la ministre de l’Intégration «n’est pas choquée» par l’organisation d’un tel webinaire: «La méthode n’est pas nouvelle. Le Luxembourg est un pays ouvert sur le monde. Si cela est utile pour le vivre-ensemble et que les personnes victimes de racisme peuvent mieux s’exprimer, alors pourquoi pas…». La présidente du DP estime par ailleurs que «les associations ont le droit de définir leurs propres critères». Reste que, de son côté, le ministère «n’organiserait pas» une telle réunion, tempère la ministre, mettant en avant les valeurs «de diversité et de non-discrimination».

Également partie prenante dans la lutte contre le racisme au Luxembourg, l’ASTI (Association de soutien aux travailleurs immigrés) considère pour sa part que le racisme «ne se combat pas avec d’autres compartimentations» et qu’il est inopportun «d’exclure qui que ce soit, chacun étant légitime pour lutter contre le racisme». Son porte-parole, Sérgio Ferreira, invite ainsi les militants «à ne pas abandonner l’universel». Pour lui, la lutte contre les discriminations raciales doit être l’affaire de tous, «particulièrement dans une société aussi diverse que le Luxembourg».

*Une première réunion de ce type avait été organisée par le réseau Finkapé l’occasion de la grève des femmes.

(Thomas Holzer/L’essentiel)